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Ma pratique artistique oscille entre une figuration de la condition humaine telle que je la perçois et la ressens, et une tendance assumée à dériver vers l’imaginaire et l’invention, peut-être pour mieux en traduire les aspects indicibles. Cette démarche plutôt intuitive explore mon conflit entre le dedans (le monde intime) et le dehors (le monde partagé) et trouve dans les moyens du dessin un révélateur d’images toujours surprenantes car jamais préméditées. Ainsi le fusain, outil né d’une combustion, m’encourage presque naturellement à laisser libre cours à des situations habitées par la fumée, le minéral, la cendre, la nuit, l’étrange. Les dessins qui résultent de cette plongée, et qui demandent parfois la précision du crayon, sont des sortes de lâchers noirs où les corps sont soumis à des fortunes variées, extrêmes et contradictoires qui, comme dans le rêve ou le cauchemar, agitent le curseur humain entre les deux pôles que sont l’angoisse et le désir. Récemment, la série Tête-bêche s’est plu à introduire la couleur en associant plusieurs procédés qui autorisent d’autres jeux de matières pour exprimer différents états des corps. La disposition particulière de ces personnages, qui flottent dans l’espace du papier, trouble le sens de lecture de façon acrobatique. Une manière encore de suggérer que ce que l’on voit est toujours à revoir autrement mais également que les êtres et les choses sont indéfectiblement liés pour le meilleur et pour le pire.